MARCVS AVRELIVS PROBVS, Empereur Romain de Juin/Juillet 276 ap. J.-C. à Septembre 282 ap. J.-C.


"Tous ceux qui ont parlé de lui ont pris soin d'observer qu'il possédait éminemment dans ses mœurs la probité qu'exprime son nom." Abbé Crevier
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Bienvenue

Bienvenue à tous les passionnés de monnaies romaines et à tous les novices en numismatique.
Ce blog est destiné à faire découvrir les monnaies romaines de l'empereur PROBUS et permettra d'en connaitre le monnayage dans son ensemble. Au fil des articles, vous y découvrirez les monnaies de ma collection pour lesquelles les commentaires vous éclaireront sur leur iconographie mais aussi retraceront l'histoire passionnante de cet empereur militaire. La publication de monnaies inédites complètera ce travail.
Bonne lecture à tous.

PROBUS COINS

Welcome to all lovers of Roman coins and all numismatic novices. This Blog will explore Emperor PROBUS's Roman coins and understand its currency. Through articles, you'll find these coins in my collection and their reviews will tell you about their iconography, as well as the fascinating history of this military emperor. The publication of unpublished coins will complete this work. Happy reading.

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CARTE DE SITUATION DES ATELIERS MONETAIRES SOUS PROBUS

CARTE DE SITUATION DES  ATELIERS MONETAIRES  SOUS PROBUS

vendredi 27 août 2010

L'étoile de la clémence à Cyzique après la mort de Florien (276 ap. J.-C.)





Description :

Cyzique, fin 276 ap. J.C., 1ère émission, 5ème officine.

Avers : IMP C M AVR PROBVS AVG, (L'empereur César Marc Aurèle Probus auguste.). Buste de Probus radié et drapé à droite (Buste Bastien : A ).


Revers : CLEMENTIA TEMP / V // XXI. (La clémence des temps). L'empereur debout à gauche regardant à droite, tenant un sceptre surmonté d'un aigle, recevant un globe de Jupiter à droite tenant un sceptre. 

Poids : 3,99 g - Diamètre : 20 mm - Axe : 6h00 - Références : RIC n° 905

Commentaires :

Après la mort de Florien dans le sud de la Turquie, Probus arrive à Cyzique, après avoir fermé les ateliers orientaux de Tripolis et d'Antioche qui produisaient des monnaies destinées à alimenter la solde de l'armée stationnée en garnison dans cette région. Avant de passer le Bosphore, l'empereur s'arrête fin 276 ap. J.-C. avec son armée dans la ville pour n'en repartir qu'au début de l'année 277 à destination de Serdica. Son arrivée est saluée par un adventus qui laissera la deuxième émission destinée aux donativa de l'armée et du peuple. La clémence des temps souhaitée dans tout l'empire depuis longtemps semble être le message récurent délivré par cette monnaie. Les citoyens espèrent retrouver un empire pacifié et aux frontières sécurisées, comme ce fut le cas pendant la période antérieure de pax romana. 
   
La première émission de Cyzique, de laquelle est issue cette monnaie, ne comporte que quelques types de revers différents, CLEMENTIA TEMP, CONCORDIA MILITVM  frappés simultanément dans les cinq officines de l'atelier. Le portrait de droit a encore les traits de Florien, l'empereur précédent, prouvant que l'image impériale ne s'est pas encore répandue dans l'empire.  On retrouve donc le même type frappé dans toutes les officines avec pour simple changement une lettre variable au centre du revers des monnaies P, S, T, Q et V. Ce type fut donc frappé avant l'arrivée de Probus dans la ville en continuité avec les revers du monnayage de Tacite. Mais un différence apparaît avec cette monnaie : c'est l'étoile figurant à l'exergue de  l'aurélianus faisant suite à la marque de valeur XXI. Le même type existe sans cette étoile surement légèrement antérieur à cette monnaie.  
L'atelier fermera ses portes, de la même manière que les ateliers orientaux,  lorsque Probus partira pour Serdica. Il rouvrira qu'en 280 ap. J.-C.
 
    
Détail de revers

mercredi 25 août 2010

Jupiter, seul maître du destin impérial à Rome. (281 ap. J.-C.)




Description :

Rome, Automne 281 ap. J.-C., début 282 ap. J.-C., 6ème émission, 2ème officine.

Avers : IMP PROBVS P F AVG, (L'empereur Probus pieux et heureux Auguste). Buste  radié et cuirassé de Probus à droite vu de 3/4 en avant. (Buste Bastien : B)
 
Revers : IOVI CONS PROB AVG // R (foudre) B, (A Jupiter le protecteur de l'empereur Probus). Jupiter nu debout à gauche, tenant un foudre de la main droite et un sceptre long de la main gauche.

Poids : 3,89 g -  Diamètre : 21 mm - Axe : 6 h00 -  Référence : RIC n° 173, MPR n° 471 
123 exemplaires dans le trésor de La Vénéra



Commentaires :

Cette sixième émission de Rome (classement Pink) se caractérise par un foudre à l'exergue entre un R signant la ville d'émission (Rome) et une lettre variable d'identification des sept officines de l'atelier, soit R(foudre)A, R(foudre)B, R(foudre)Γ,  R(foudre)Δ, R (foudre)E,  R(foudre)ζ et R(foudre)Z. Chaque officine frappe un type qui lui est propre. Elle correspond à une émission de fête célébrant le triomphe de Probus dans la ville à son retour de la campagne d'Orient. Elle est une des plus volumineuse frappe d'auréliani, mais aussi d'aurei,  de médaillons et de moyens bronzes de l'atelier, comportant aussi des quinaires et des deniers destinées au donativum distribué à cette occasion.
L'avers nous présente un buste cuirassé de Probus remplissant toute la surface du flan. En effet, une réduction du diamètre des aureliani intervient à Rome à partir de la phase 3.3 décrite par J. Guillemain dans son ouvrage MPR. La surface se réduit en moyenne d'un millimètre et induit en conséquence une diminution de la taille de l'effigie de droit et de l'iconographie de revers avec un raccourcissement de la titulature. Cette caractéristique semble être la conséquence d'une évolution technique de frappe par une modification dans le processus de fabrication des flans bien que le poids de la monnaie soit toujours respecté. 

L'image de Jupiter au revers de cette monnaie s'impose dans l'émission de Rome car sa vénération dans la capitale, qui abrite le plus ancien temple de Jupiter sur le Capitole n'a pas failli tout au long des années. On constate qu'il existe une dualité durant tout le monnayage, opposant le dieu des dieux de la religion romaine archaïque avec le dieu Sol Invictus nouvellement importé d'Orient et remis à la mode par Aurélien. L'ancienne et la nouvelle divinité du paganisme romain coexistent dans la religion du IIIème siècle et leurs représentations monétaires se distribuent savamment  selon les ateliers de frappe. 

Jupiter Capitolin reste le plus grand, maître des dieux de la religion romaine, le dieu du ciel et de la terre. Ancienne divinité Etrusque, Jupiter fut d'abord vénéré comme le dieu des phénomènes atmosphériques, lumière, tonnerre et foudre, sous le nom de Jupiter Elicius. Il fut par la suite pourvu de nombreuses fonctions, intégrant dans son culte les petites divinités locales italiennes comme le relève le grand nombre de surnoms qu'il porta : Tonans, Fulgurator, Pluvius, Latinus, Soter, Fulminator etc... Il forme avec Junon son épouse et sa fille Minerve la triade Capitoline qui protégeait la ville et veillait sur la stabilité de l'état romain. Il fut aussi le dieu politique garant des lois et des traités, légitimant les guerres et les combats que décidaient les empereurs et le Sénat. Il est vraisemblable que Probus lors de son triomphe ne dérogea pas à la règle voulant que lors d'un triomphe public, l'empereur alla dans le temple Capitolin déposer des lauriers sur les genoux de la statue de Jupiter, signifiant ainsi que seul le dieu des dieux permettait d'être victorieux, légitimant ainsi la puissance de l'empereur. Il protège l'empereur comme le signifie la légende de cette monnaie et de fait lui donne sa puissance.
Issu de la mythologie grecque, l'image du  foudre est l'œuvre des Cyclopes Brontès (Stéropès et Argès), ouvriers qui obéiront au dieu forgeron Héphaïstos. Ils en feront don à Zeus (Jupiter chez les romains) et deviendra avec le tonnerre et l'éclair son attribut symbolisant sa puissance céleste. On dit aussi que le premier détenteur du foudre fut Cronos, qui le détenait comme l'emblème de son pouvoir sur le feu céleste. Le Titan détrôné le remit à Zeus.

C'est donc aussi cet emblème qui fut choisi pour marquer cette frappe particulière, de fête et de triomphe à Rome en cette année 281 ap. J.-C. Ce symbole de la puissance divine gravé à l'exergue des monnaies de cette émission rappelle au peuple et à l'empereur que les victoires militaires ne sont possibles qu'avec la volonté du dieu tout puissant, seul maître de la grandeur des hommes de pouvoir qui le servent.


Détail de Jupiter au revers

vendredi 20 août 2010

La restauration de l'armée à Cyzique avant la campagne d' Egypte (280 ap. J.-C.)




Description :

Cyzique, 280 ap. J.C, 3ème émission, 3ème officine.

Avers : IMP C M AVR PROBVS P F AVG, (L'empereur César Marc Aurèle Probus pieux et heureux Auguste). Buste radié, drapé et cuirassé de Probus à droite. (Buste Bastien : A)

Revers : RESTITVTOR EXERCITI // T // MCXXI, (Le restaurateur de l'armée). Mars casqué à gauche, regardant à droite, tenant une lance de la main droite, offrant un globe à l'empereur en habit militaire  debout à droite regardant à gauche et tenant un sceptre de la main gauche.

Poids : 3,37g - Diamètre : 22mm - Axe : 6 h00 - Références : RIC/ n°909

Commentaires :

L'atelier de Cyzique a produit sous le règne de Probus seulement quatre émissions monétaires par intermittence.
Les deux premières émissions sont frappées de l'année 276 jusqu'au début 277 ap. J.-C., période pendant laquelle l'empereur est dans la ville où il y passe l'hiver avec son armée. Il en repartira au début de l'année 277 pour se rendre à Serdica. A cette période, l'atelier compte cinq officines notées P, S, T, Q, V jusqu'à sa réouverture en 280 ap. J.-C. Les deux autres émissions sont frappées après une suspension d'activité de presque trois ans. Cette réouverture correspond à la réinstallation d'une partie de l'armée de Probus à Cyzique en 280 ap. J.-C. L'atelier s'enrichit de deux officines supplémentaires lors de la dernière émission notées A, B, Γ, Δ, ε, ζ, Ζ.  Les monnaies de ces émissions se caractérisent par la présence des lettres CM ou MC (Moneta Cyzici) à l'exergue du revers.

A sa réouverture  en 280 ap. J.-C., l'atelier frappe  deux revers différents, à caractère militaire, simultanément dans les cinq officines. Ces légendes de revers RESTITVTOR EXERCITI  comme sur cette monnaie et CONCORDIA MILITVM célèbrent la réinstallation de l'armée dans la ville. En effet, la légende de cette monnaie marque la restauration de l'armée romaine car Probus vient tout juste d'enlever les légions de Serdica pour recomposer un corps militaire plus important à Cyzique. Cette nouvelle armée destinée à écraser les barbares (Blemmyes) dans la campagne d'Egypte que Probus prépare à Cyzique s'en retrouve que plus forte. A cette occasion, l'iconographie  monétaire rappelle les victoires de l'empereur  sur les peuples barbares, les derniers vaincus étant les Thraces, les prochains seront les Blemmyes en Egypte. Destinée à alimenter en numéraire la solde des militaires stationnés à Cyzique, cette émission offre la vision d'une armée cohérente et réorganisée par Probus. Cette deuxième période de production s'achèvera en  281 ap. J.-C.

En comparant ce type monétaire avec les types antérieurs frappés sous Aurélien à Cyzique, on s'aperçoit que P. Webb donne une description erronée du revers dans le RIC V/II . Il s'agit bien d'une représentation de  Mars casqué, à gauche sur la monnaie, offrant un globe céleste à l'empereur, lui offrant ainsi le pouvoir militaire, après ses glorieuses victoires. Ce type est repris de la dixième émission de Cyzique pour Aurélien émise en 275 ap. J.-C.  (RIC n°366).


 
 Détail du revers

dimanche 15 août 2010

Un faux type CALLIOPE AVG de Siscia regravé sur un Aurélianus SALVS PVBLIC de Ticinum.



Aurélianus regravé à partir d'un type  RIC n°567 de l'atelier de Ticinum

Il y a quelques temps, la photo d'un Aurélianus de Probus au type CALLIOPE AVG de l'atelier de Siscia a été postée sur un forum numismatique américain, afin d'obtenir plus de renseignements sur cette monnaie. Mais la monnaie reproduite ci-dessus est en fait une supercherie d'une grande qualité. En effet, le type  CALLIOPE AVG de l'atelier de Siscia a été obtenu en regravant un Aurélianus courant de type SALVS PVBLIC de l'atelier de Ticinum (RIC n°567, Ticinum, 279 ap. J.-C., 6ème émission, 3ème officine) avec la marque d'exergue ΓXXI. D'après mes recherches ce type, issu d'une très rare émission encore énigmatique, n'est connu qu'à six exemplaires attestés. Mais il est clair que d'autres exemplaires apparaitront au fil du temps.

Voici la démonstration que cette monnaie n'est pas un type authentique mais regravé  avec talent sur une monnaie existante :

L'AVERS :
L'étude de l'avers de cette monnaie semble indiquer que le style et la graphie des lettres correspondent à l'atelier de Ticinum. Le type étant rarissime, peu de coins ont du être gravé pour la frappe de cette monnaie. J'ai relevé seulement deux coins d'avers différents du buste consulaire et un coin pour un buste militaire.
Le buste consulaire est fin et présente une tête proportionnée sur cet exemplaire. Il semble que le manteau consulaire ait subi lui aussi quelques modifications de gravure pour en améliorer les détails. Mais le plastron central de forme circulaire sur ce buste, n'a pas la même forme que sur les exemplaires attestés de type CALLIOPE AVG. En effet, ils présentent tous un losange central, caractéristique commune des deux coins d'avers du buste consulaire. Un des rubans descendant de la couronne radiée finit sur le cou. Ce détail de gravure est absent sur les monnaies attestées.
Par ailleurs, en observant la titulature, on constate que les lettres sont aussi larges que hautes, de gravure épaisse et profonde et les M sont liés. Ces particularités graphiques nous ramènent au style de l'atelier de Ticinum, le style de Siscia offrant des lettres beaucoup plus finement gravées et de taille plus petite.

LE REVERS :
La représentation de Calliope interpelle dès le premier regard car le haut du corps de la muse ne semble pas aligné avec les jambes. Celui qui a modifié la monnaie a tenté de masquer les éléments de l'iconographie première. Cette monnaie a été engravée à partir d'un aurélianus de type SALUS PVBLIC, présentant la santé (Salus) à droite, nourrissant un serpent. Le drapé de la toge a servi à cacher la queue du serpent, la tête et la partie haute du reptile étant utilisés dans la gravure de la lyre de Calliope. Le bras droit de la muse n'a pas les proportions correctes.
La graphie de la légende n'est pas plus homogène que l'effigie. La composition de la légende SALVS PVBLIC a été intelligemment étudiée afin de pouvoir modifier au mieux la nature des caractères. Mais le style et les artefacts laissés sur les lettres ne trompe pas.
Le gamma (Γ) de la marque d'exergue à été transformé en C. De fait, la nouvelle légende n'est pas centrée et commence plus bas du coté gauche. Le S de SALVS se transforme en A, le A de SALVS en L, le L reste inchangé, le V en I, le S en O, Le P de PVBLIC ne change pas, le V se transforme en E, le B est effacé , le L devient le A , le I devient le V et le C en G.

Les différents exemplaires attestés du type CALLIOPE AUG.

Ce type fort rare manque à la collection Missong du Musée de Vienne et à la collection Pflaum de la BNF à Paris. Il présente un buste consulaire à gauche ( Buste Bastien : H2) et de titulature invariable IMP PROBVS P F AVG. Signalons, une monnaie avec un buste militaire ( Buste Bastien : E)  pour la même titulature. Le revers de légende CALLIOPE AVG nous montre la muse Calliope à droite, diadèmée, jouant de la lyre, appuyée sur son genou gauche, le pied sur un globe (?).

Notons le losange du plastron, caractéristique du buste consulaire (Buste Bastien :H2)

Calliope tient son origine de la mythologie grecque (Καλλιόπη). Elle est la muse de la poésie épique et de la grande éloquence. Fille de Zeus et de Mnémosyne, le front ceint d'une couronne d'or, elle serait  la muse dominante parmi les huit autres de ses sœurs.

Cette monnaie fut mentionnée pour la première fois au cours du XVIIIème siècle par A. Banduri (1718) et H. Tanini (1791), décrite par J. Eckhel en 1797.  H. Cohen signale deux fois le type (1865 et 1886) et la classe parmi les monnaies d'une rareté extraordinaire (Cohen n° 83). P. Webb ne la signale pas dans le RIC, (1933) n'ayant eu sous les yeux qu'un faux apparu à cette période. K. Pink la signale dans la note n°18 p 49 de sa publication "Der aufbau der Romischen Münzpragung in der kaiserzeit : VI/ 1 Probus",  NZ, Wien 1949.
A. Alfoldi, ayant étudié les deux exemplaires des collections Gnecchi et Weifert  en attestera finalement l'existence réelle.

 De même coins d'avers et de revers que l'exemplaire vendu par Lanz. 

Les exemplaires connus de ce type sont au nombre de six : deux dans les collections des musées nationaux  (dont nous n'avons pas les photos) et quatre dans des collections privées. L'exemplaire de la collection Gnecchi est maintenant au musée national de Rome. Celui de la collection Weifert est à Belgrade. Deux autres exemplaires ont été vendus par la maison Lanz (Vente Auction 100, 20.11.2000, lot n°419) et par  CNG (Vente Triton IX, 10.09.2006, lot n°1512). Deux autres exemplaires privés sont apparus sur internet, dont une monnaie, dans un état médiocre mais particulièrement intéressante car elle présente un buste militaire (Buste Bastien : E), ce qui laisse penser que la production, même très limitée, fut plus importante que ce qu'on pouvait l'imaginer.

Unique exemplaire avec un buste militaire (Buste Bastien : E) pour ce type.

Quelques hypothèses ont été formulées pour tenter d'expliquer cette émission autant exceptionnelle qu'inhabituelle : l'apparition de ce type présentant la muse de la poésie épique en pleine période d'invasions barbares et de guerre civile est troublante au regard des autres représentations de l'époque.
Le fait qu'aucune marque d'exergue ne soit gravée, contrairement à toutes les monnaies issues de l'atelier de Siscia, semble en faveur d'un type expérimental ou d'un module frappé pour célébrer un évènement précis. Eckhel explique l'existence de ce type comme une sorte d'hommage rendu par la ville à l'excellence militaire et à la Virtus de l'empereur. En effet, cette monnaie semble avoir été émise à l'automne 278 ap. J.-C., lorsque Probus passe par Siscia, victorieux de ses campagnes militaires lancées sur le limes du Rhin  en Gaule et en Rhétie contre les Francs et les Alamans, les Goths, les Burgondes et les Vandales. Un triomphe fut sans doute fait à l'enfant du pays. Il lancera sa campagne d'Orient juste après.
Une autre hypothèse explique qu'un poème épique narrant les victoires héroïques et la bravoure de Probus, fut publié à cette époque. Cette littérature ayant déplu à l'armée et à l'empereur, la production du type monétaire en fut rapidement arrêtée.

Coin d'avers différent, même coin de revers que les autres exemplaires


mercredi 11 août 2010

Particularités stylistiques des bustes de PROBUS dans les différents ateliers monétaires.



Les Scalptores des différents ateliers émettant des monnaies sous le règne de Probus ont plus ou moins d'originalité, de création et de maîtrise de leur art. A cette époque, il existait pas moins de huit ateliers destinés à la production monétaire pour Probus. Par conséquent, les graveurs ont fait preuve d'originalité et d'idées novatrices dans la gravure des types mais aussi des bustes monétaires. Les graveurs de coins, d'origine et de formations différentes ont retranscrit au mieux le portrait de leur empereur, quelquefois dans l'urgence historique et souvent en l'absence de sources iconographiques, s'inspirant parfois de la physionomie de l'empereur précédent. De fait, il n'est pas rare de trouver dans les premières émissions monétaires de Probus des portraits de transition ressemblant fortement à celui de son prédécesseur Florien.

Outre le fait que le portrait évolue selon la période de frappe au sein d'un même atelier, il se dégage quand même quelques critères de style spécifiques à chacun. En effet, lorsque l'on étudie le monnayage de Probus, on constate, en dehors des marques de revers permettant d'identifier la provenance de la frappe, que certaines constantes stylistiques peuvent aider à reconnaître  l'atelier  d'émission  simplement par l'observation de la nature du buste d'avers. A titre d'exemple, comparons le même buste de droit (buste A de la classification de P. Bastien)  pour les huit ateliers de gravures différents, l'atelier d'Alexandrie étant mis à l'écart dans cette étude car ses émissions si particulières de Tétradrachmes sont facilement identifiables et ne peuvent se comparer avec la gravure des Auréliani.


1 - Le style de l'atelier de TRIPOLIS :


Aurélianus produit par l'équipe 1 de l'atelier de Tripolis

Les monnaies issues de cet atelier ne représentent qu'une part infime du monnayage  de Probus avec seulement deux émissions. La circulation monétaire en fut très limitée, voire locale, l'atelier étant ouvert en 273 ap. J.-C. dans l'idée que son existence ne serait que provisoire. Cet atelier, dans lequel deux équipes travaillent conjointement, fonctionne en complète synergie avec l'atelier d'Antioche, émettant des types similaires. Il est attesté que certains graveurs d'Antioche furent transférés à Tripolis lors de son ouverture pour travailler dans ce nouvel atelier. Par conséquent, les monnaies comportent des ressemblances stylistiques flagrantes. La deuxième équipe de l'atelier signe ses monnaies par l'addition d'un globule à la fin des légendes de revers.
Le style de l'atelier de Tripolis se caractérise par un traitement géométrique de la chevelure de Probus par petites incisions, par une arcade sourcilière proéminente et une couronne radiée qui semble trop grande, finissant dans le vide à la partie postérieure de la tête, les rubans étant éloignés de la nuque. On note une différence du nombre de rayons sur la couronne radiée entre l'atelier de Tripolis et celui d'Antioche : en effet, la couronne gravée à Tripolis comporte quatre rayons centraux entre les deux des extrémités tandis que celle d'Antioche n'en compte que trois. Le drapé du paludamentum est ample et aérien.
La graphie des lettres composant la titulature montre que les lettres sont gravées plus en superficie et les caractères sont souvent plus larges que hauts. Notons que les jambes qui composent  la lettre M sont reliées entre elles contrairement au M des monnaies d'Antioche ressemblant à un V entre deux I ( IVI ). Les lettres C semblent plus ouvertes et les S semblent plus grands que les autres caractères.

2 - Le style de l'atelier d'ANTIOCHE :


Portrait typique de l'atelier avec le nez légèrement busqué

En première intention, les émissions Syriennes sont destinées, comme la production de Tripolis, à alimenter le paiement de la solde des troupes engagées dans les combats régionaux. L'atelier ne compte que deux émissions comme pour Tripolis, correspondant aux périodes de présence militaire  sur le territoire. L'atelier d'Antioche frappe pour Probus dans la continuité des types employés pour Tacite, cet atelier n'ayant pas produit de monnaie pour Florien. Le style de gravure sera reproduit avec quelques différences à l'atelier de Tripolis non par influence stylistique mais par le transfert d'ouvriers-graveurs d'un atelier à l'autre.
Le style de l'atelier d'Antioche se caractérise par un profil impérial massif, rude, sur lequel on remarque qu'il n'existe pas de zone intermédiaire entre le front et le nez. En effet, la ligne dessinant le profil est quasiment droite, ne marquant presque pas la différence de volume entre les deux parties du visage. Le cou est légèrement plus massif et rectangulaire que ceux rencontrés sur les bustes de Tripolis, plus étroits à leurs bases. Comme nous l'avons déjà vu, la couronne solaire ne compte que trois rayons centraux entre les deux des extrémités. Les rubans semblent aussi plus près de la nuque et le paludamentum plus ajusté.
La graphie nous révèle que la gravure des lettres est plus profonde et le jambage bien plus large que celui de Tripolis. les M ne sont pas liés (IVI) et la taille des caractères est aussi haute que large. Le S semble aussi plus grand que les autres lettres.


3 - Le style de l'atelier de CYZIQUE :


Portrait de type A longiligne

L'atelier de Cyzique a émis des monnaies par intermittence. Comptant cinq officines à ses débuts, elle termine sa production dans sept officines à la fin du règne de Probus. Les scalptores de Cyzique sont de très bons ouvriers nous ayant laissé des portraits d'une facture incomparable. Certains furent déplacés à Siscia.
Le style de l'atelier de Cyzique se caractérise par une  gravure de la chevelure soignée. Le cou est long, l'arcade sourcilière fine et la pommette de la joue saillante. La tête et le buste occupent moins de place sur le champ de la monnaie que dans les autres ateliers, donnant cette impression d'un empereur longiligne. Il n'en est pas de même pour les monnaies avec un portrait militaire pour lesquelles le buste et la tête sont beaucoup plus massifs. La finesse du trait permet d'obtenir une frappe élégante.
La graphie nous révèle que la lettre O de la titulature est bien ronde et de taille plus petite que les autres caractères. Cette particularité notable est propre à l'atelier de Cyzique depuis les frappes monétaires d' Aurélien. On note sur certains auréliani que la lettre V n'est pas fermée en bas. La gravure des lettres est tout aussi soignée que celle du buste.


4 - Le style de l'atelier de SERDICA : 


Buste de Serdica

L'atelier de Serdica ouvre ses portes sous le règne d'Aurélien durant l'été 271 ap. J.-C. Il accueille les scalptores en exil de l'atelier de Rome qui vient d'être fermé. Serdica produira pour Probus cinq émissions frappées dans quatre officines à ses débuts, puis trois et deux seulement pour la dernière. Les graveurs de l'atelier romain arrivent à Serdica avec leur expérience déjà acquise depuis de nombreuses années dans l'atelier central et apportent une gravure soignée et de grande qualité à la production monétaire de Serdica.
Le style des graveurs de Serdica est assez particulier et nous offre des portraits expressifs mais assez figés. La tête est de taille moyenne et le nez est fin, de forme angulaire avec une arrête bien marquée. Le paludamentum est représenté jusqu'à la racine des épaules avec un drapé près du corps. Sur certains aureliani les bustes sont plus longilignes et rappellent le style de l'atelier de Rome.
La graphie  atteste le transfert des graveurs de l'atelier central car les lettres A, V, M et N de la titulature ne sont pas fermées à leurs extrémités, une particularité que l'on retrouve à l'identique dans les émissions antérieures de l'atelier de Rome. L'emploi sans différence de gravure de la lettre G avec la lettre C est aussi observée sur ces auréliani. En effet, le mot AVG semble être écrit AVC à la fin de la titulature.



5 - Le style de l'atelier de SISCIA :



Visage avec menton proéminent

Crée par Gallien en 265-266, cet atelier pannonien fut très productif et novateur pour le monnayage de Probus, offrant une grande variété de combinaisons de titulatures, de bustes impériaux et militaires. Probus y séjourna à plusieurs reprises, servant de point de ralliement des armées entre l'orient et l'occident. Sa ville natale (Sirmium) en était proche. L'étude des coins permet de constater que certains graveurs issus de l'atelier de Cyzique et de Serdica sont arrivés avec l'armée de Probus et ont contribué au fonctionnement de l'atelier pendant les années de présence de l'empereur dans la ville. De fait, certaines similitudes de gravure avec ces ateliers se retrouvent dans ces émissions de Siscia.
Le style de portrait  de l'atelier de Siscia est caractéristique et peu ressemblant à Probus dans les premières émissions. Il reprend un visage de transition avec les traits de Florien. Mais l'image sera vite corrigée dès l'année 277 ap. J.-C. par l'arrivée de l'empereur et de ses graveurs. Le menton est épais et large, presque prognathe, la barbe fournie et l'oreille bien dessinée. La gravure est plus ronde et les reliefs moins angulaires que dans les autres ateliers.
La graphie offre des caractères de petite taille, plus large que haut et finement gravés. Le V est souvent ouvert à sa partie inférieure.



6 - Le style de l'atelier de TICINUM :


Buste de Ticinum

L'atelier de Ticinum (actuelle Pavie) produit une grande quantité d'auréliani frappés dans six officines simultanément. Il est un transfuge de l'atelier de Milan à Ticinum pour des raisons politiques (Milan étant trop proche du camp militaire des Equites, dont le commandant pourrait devenir usurpateur) et pratiques (Ticinum propose des voies navigables utiles pour le transport des métaux).
Le style des graveurs de l'atelier de Ticinum offre des bustes de qualité, finement gravés, élancés et d'une grande variété. La tête souvent de petite taille, avec un regard précis, une pommette saillante, un long cou comme sur les monnaies d' Aurélien pour les émissions de Milan avant la réforme. La chevelure est traitée finement par des incisions de petite taille et ses limites bien marquées.
La graphie nous montre une titulature bien proportionnée et des lettres régulières et épaisses, gravées profondément remplissant bien le contour du champ de la monnaie. Aussi larges que hautes, elles sont bien différenciées et séparées d'un espace convenable. On distingue bien la différence entre le C et le G contrairement à d'autres ateliers et les M sont liés.




7 - Le style de l'atelier de LYON :


Portrait de Lyon de style angulaire

L'atelier Lyonnais reprend du service avec sa réouverture par Aurélien en 274 ap. J.-C. Mais la ville est bientôt soumise à des attaques germaniques. Probus passe par Lyon avant d'aller combattre sur le limes du Rhin. Lyon connaîtra un soulèvement populaire mené par l'usurpateur Proculus, un riche propriétaire, terrien, aidé d'une armée d'esclaves. Mais Probus écrasera la rébellion en 280 ap. J.-C. L'atelier frappera  neuf émissions sous Probus reparties dans quatre officines.
Le style de l'atelier de Lyon présente une gravure vigoureuse et profonde. Reconnaissable de part la composition du flan, surement de nature plus ferreuse que dans les autres ateliers, (des dépôts rougeâtres sont fréquents sur ces auréliani) les monnaies Lyonnaises présentent des portraits de Probus ressemblant à Florien durant les premières émissions. La gravure du visage sera plus proche de la vérité lorsque les scalptores auront l'occasion de prendre sur le vif les traits caractéristiques de Probus, fin  277 ap. J.-C., lorsque celui-ci installe son quartier général dans la ville avant d'aller affronter les Alamans. Le visage nous offre un sourcil discret, un nez fin, un menton fuyant et un traitement de la barbe et de la chevelure faite par des incisions épaisses.
La graphie présente une titulature composée de grandes lettres épaisses, aussi larges que hautes et d'une grande régularité. L'insertion dans la titulature de globules dont le rôle n'est pas encore défini clairement est une caractéristique propre à l'atelier de Lyon, permettant sans se tromper d'affirmer la provenance d'une monnaie au premier coup d'œil. L'hypothèse expliquant la présence de ces globules pourraît être que cet atelier aurait récupéré des graveurs de l'atelier de Cologne à sa fermeture en 272 ap. J.-C.


8 - Le style de l'atelier de ROME :


Portrait avant la réduction de 280 ap. J.-C.

L'atelier central est l'un des plus productif dans le monnayage de Probus, frappant dans sept officines simultanément. Fermé en 271 ap. J.-C. par Aurélien, il rouvre en 273 ap. J.-C. Sa qualité de gravure est incomparable avec les autres ateliers et donne à voir une multitude de détails enrichissants sur les attributs vestimentaires de l'empereur.
Le style de l'atelier de Rome est particulier et facilement reconnaissable. La tête est petite, avec une pommette saillante, un nez dont les ailes sont bien relevées et un cou fin et assez long. Le diamètre du flan se réduit  lors de la cinquième émission de 280 ap. J.-C. et entraine par conséquent une réduction de la taille des bustes et des titulatures plus courtes.
La graphie offre une grande taille des lettres qui composent la titulature et  le corps des caractères est assez épais. La titulature est généralement courte dans cet atelier. Le M et le N ouverts à une époque plus ancienne sont maintenant bien fermés. Par contre le V reste souvent ouvert comme sur les monnaies de Siscia.


La liste des critères de différentiation des styles de gravure des ateliers dressée ici n'est pas exhaustive et n'a pour but que de dégager quelques observations permettant de reconnaître l'atelier de frappe pour un même type de buste de droit. Il est clair qu'avec le ballet incessant des transferts de scalptores et des fermetures et réouvertures d'ateliers, certaines caractéristiques stylistiques ne sont valables que pour une période bien précise.


lundi 9 août 2010

Mars pacificateur sur un Aurélianus de Lyon. (276 ap. J.-C.)





Description:


Lyon, Novembre- Décembre 276 ap. J.-C., 2ème émission, 2ème officine.

Avers : IMP C M AVR PROBVS AVG. (L'empereur César Marc Aurèle Probus  Auguste). Buste radié et cuirassé de Probus à droite vu de 3/4 en avant avec pan de paludamentum sur l'épaule gauche. (Buste Bastien : B).

Revers : MARTI PACIFERO // II. (A Mars pacificateur). Mars casqué en tenue militaire à gauche, tenant un rameau d'olivier de la main droite et une haste renversée de la main gauche, un bouclier derrière appuyé au sol.

Poids : 3,91 g -  Diamètre : 22 mm - Axe : 6h00 - Références : RIC n°42 - Bastien : n°167.


Commentaires :

Ce revers est nouveau pour l'atelier Lyonnais et rompt avec les reprises de types  empruntés au monnayage de Tacite et Florien, comme ce fut le cas dans la première émission de courte durée. Cette continuité fut sans doute décidée en l'absence d'instructions précises par le procurator monetae de l'atelier de Lyon. On peut noter aussi l'évolution stylistique du portrait qui ressemble fort encore à celui de Florien mais qui évolue lentement pour être tout à fait ressemblant  au nouvel empereur au cours de la troisième émission.

Cette deuxieme émission, séparée en deux phases ne présente qu'une seule titulature de droit : IMP C M AVR PROBVS AVG.
La première phase correspond à l'émission de monnaies sans marque d'officine destinées à un donativum. Les monnaies seront distribuées aux citoyens dans la ville en l'absence de l'empereur. Le buste de Probus est cuirassé à droite, la partie gravée de la cuirasse étant très courte et marque un changement avec les effets des bustes de Florien, le plus souvent drapés.
La deuxième phase de cette deuxième émission propose des monnaies avec les marques d'officines I, II, III, et  IIII à l'exergue du revers. Lors de cette phase, la deuxième officine est dévolue à la frappe des représentations de Mars avec un revers MARS VICTOR, repris de la huitième émission de Tacite et  un revers MARTI PACIFERO qui est nouveau pour l'atelier de Lyon.

Mars, assimilé à Arès chez les Grecs, est sans doute le plus romain des dieux, touchant de près l'histoire de Rome. En effet, la tradition fait de lui le père de Romulus. S'il est le dieu de la guerre par excellence, il fut aussi le dieu de l'agriculture, du printemps dans des temps reculés. Son culte est complexe. Il est représenté  sur cet aurélianus dans sa nature militaire, patron et dieu tutélaire des soldats. Les empereurs lui attachent une dévotion particulière, encore plus Probus, issu des rangs militaires, maître de l'empire et général des armées. Mars revient souvent dans les inscriptions monétaires avec une grande variété d'épithètes : MILITARIS, POTENS, CAMPESTER rappellent son caractère guerrier. PROPUGNATOR, CVSTOS, CONSERVATOR expriment son rôle protecteur des armées. VICTOR, INVICTVS, les plus répandus, mettent en avant l'idée qu'il procure la victoire. Mars VLTOR, mis en place par Auguste est le dieu vengeur. PACIFER comme pour cet aurélianus et PACATOR montre qu'il est aussi celui qui procure la paix de l'empire. Un programme pour lequel Probus livrera combats aux quatre coins du territoire romain...

Détail du revers


dimanche 8 août 2010

La valeur militaire impériale présente à Rome pour la deuxieme émission (277 ap. J.-C.)





Description :

Rome, 277 ap. J.-C., 2ème émission, 5ème officine. 

Avers : IMP C M AVR PROBVS P F AVG, (L'empereur César Marc Aurèle Probus pieux et heureux Auguste). Buste consulaire radié à gauche de Probus  portant la toga palmata (trabea) et le scipio, sceptre surmonté d'un aigle. (Buste Bastien : H2)

Revers : VIRTVS AVGVSTI // Rε, (La bravoure de l'Auguste). Roma debout à gauche en habit d'amazone, la main droite sur un bouclier à terre et  tenant une lance de la main gauche.

Poids : 3,94 g - Diamètre : 22mm - Axe:12h00 - Référence : RIC/n°234.


Commentaires :
 
Cet aurélianus, pour lequel on retrouve 12 exemplaires dans le trésor de La Venera est issu de la deuxième émission. Commençant au Printemps 277 ap. J.-C pour l'arrivée de Probus dans la capitale, l'émission se termine à la fin de la même année. Elle est contemporaine de la campagne germanique du Rhin et du Danube que Probus mène, après son passage dans la ville. Mais cette frappe finit avant la conclusion victorieuse de la campagne qui sera célébrée sur les types de la troisième émission par les revers VICTORIA GERM. Probus passe par Rome afin d'obtenir la reconnaissance du sénat mais aussi pour rassurer la population de l'Urbs sur ces intentions politiques. Tout juste victorieux des Goths avec sa puissante armée, ayant reconquit soixante villes en Gaule, massacré 400 000 barbares et repoussé le reste au delà du Jura Souabe et du Neckar selon l'Histoire Auguste, l'empereur militaire est maintenant prêt à s'attaquer de la même manière aux invasions Germaniques (des Alamans et des Juthunges) sur le limes Rhénan.


Cette deuxième émission de Rome, riche de dix bustes différents et de six nouveaux types de revers est la conséquence d'un vaste programme iconographique, mis en place par l'administration monétaire afin de célébrer le premier consulat de Probus, exaltant sa Valeur militaire qui laisse présager ses futurs succès au combat. Ce buste de droit en habit consulaire (H2) richement orné et de gravure soignée nous permet de voir tous les détails décoratifs de la trabea.
La deuxième émission compte deux phases, la première phase étant notée à l'exergue R (pour Roma, la cité émettrice). Cette émission voit aussi la disparition de la marque de la réforme monétaire d'Aurélien notée XXI  qui était présente pour la première émission. La deuxième phase de la deuxième émission, dont cette monnaie est issue, compte sept  officines, notées R, mais cette fois suivie de lettres latines et grecques : R et RA, RB, RF, RΔ, Rε, Rζ, RZ.

La personnification de la Virtus tient son origine d'une religion connue sous la République, où elle est représentée soit seule, soit apparentée à d'autres divinités similaires. Certains numismates y voient une représentation de Mars, d'autres simplement un soldat symbolisant l'armée entière, ou bien encore une femme debout casquée (Roma), en habit d'amazone, un sein nu, tenant un bouclier et une lance. Cette dernière interprétation décrivant Roma, vêtue d'un Chîton court, frappée simultanément dans trois officines (A, B et ε) semble la plus probable pour ce type. On retrouve la légende VIRTVS AVGVSTI associée avec le type  représentant Mars marchant à droite, un trophée sur l'épaule, révélant ainsi l'hésitation des graveurs du IIIème siècle entre l'emploi de la personnification féminine et masculine de la Virtus militaire, qualité masculine  et guerrière mais dont le mot est de genre féminin.
Au temps de la République Cicéron  disait : "La sagesse et l'intelligence nous sont venues des dieux et c'est pour cette raison que nos ancêtres ont consacré et publiquement honorés Mens, Fides, Virtus, Concordia. Comment pourrait-on nier ces divinités, puisque nous les vénérons sous la forme d'images augustes et saintes ?". Les lois des douze tables relatives au culte des dieux célestes, citent  aussi ces personnifications, Mens, Virtus, Pietas et Fides et proclament que "Par elles l'homme s'élève jusqu'au ciel ; les temples auxquels elles ont droit sont justement refusés aux personnifications des vices." En 243 av. J.-C., on construisit des temples doubles pour honorer Virtus et Honos après des victoires militaires importantes.
Sous l'empire, les calendriers mentionnent une fête en l'honneur des deux divinités que l'on célébrait le 29 Mai. Le culte de Virtus associé à Honos et groupées en cortège avec Mars a une signification militaire dominante.

Cette représentation semble donc ici se rapporter aux actes glorieux du nouvel empereur qui  a déjà une belle carrière militaire victorieuse derrière lui. C'est grâce à cette valeur  militaire et morale que l'armée le porta au pouvoir quelques mois auparavant. Cette Virtus militaire rassure la population, sans cesse pillée par les  barbares et affirme que le nouvel empereur, présent à la tête de l'armée, est bien décidé à rectifier cette situation traumatisante.


Détail du buste

lundi 2 août 2010

L'espérance et le poinçonnage varié des lettres d'officines de l'atelier de Lyon (282 ap. J.-C.)



Lettre d'officine C rétrograde à droite


Description :

 Lyon, 282 ap. J.C, 9ème émission, 3ème officine

Avers : IMP C M AVR PROBVS AVG, (l'Empereur César Marc Aurèle Probus Auguste). Buste de Probus radié,  drapé et cuirassé à droite vu de 3/4 arrière. (
Buste Bastien : A2)

Revers : SPES AVG // C rétrograde, (l'espérance de l'Auguste). L'espérance marchant à gauche, drapée, tenant une fleur de la main droite et le pan de sa robe de la main gauche.

Poids : 3,78 g - Diamètre: 22 mm - Axe : 2h00 - Référence : RIC/ n°127 var  - Bastien : 419

Commentaires : 

L'espérance personnifiée sur ce revers, contrairement aux grecs, eut des sanctuaires à Rome dès les premiers temps de la République. Elle est représentée sous les traits d'une jeune femme, vêtue d'une tunique sur laquelle est drapée un long manteau dont elle relève l'extrémité inférieure d'une main et tient une fleur en bouton de l'autre main. Elle était la déesse que l'on invoquait (honorée pour les travaux agricoles mais aussi pour le succès militaire) afin que l'objet ou le fait convoité devienne une réalité. Souvent associée à d'autres divinités, on en retrouve une image au temple de la Fortune à Préneste.

L'atelier, divisé en quatre officines pour le monnayage de Probus, compte neuf émissions effectuées entre Octobre 276 et Août 282 ap. J.-C. Cette monnaie de la neuvième émission (qui se situe entre Janvier et Aout 282) se démarque des précédentes par un changement de codes de notation des officines et sur les neuf émissions de l'atelier Lyonnais, seule la dernière est notée avec ce système : on assiste à l'abandon du système de chiffres romains (I, II, III, IIII) notés à l'exergue des monnaies pour revenir au système alphabétique romain déjà employé sous Tacite A, B, C et D. Les lettres placées dans le champ de la monnaie, notent les quatre officines de Lyon. Ce type de revers présentant Spes apparaît dans cette neuvième émission pour les troisième et quatrième officines. La troisième officine partage sa frappe pour les revers  PAX AVG, PIETAS AVG et PIAETAS AVG et ce nouveau type SPES AVG.

Si on étudie l'émission précédente, on s'aperçoit que certains types de la neuvième émission sont frappés par les même coins que ceux utilisés dans la huitième émission. Seul le poinçonnage de la lettre d'officine change. P. Bastien signale même un aurelianus poinçonné B dans le champ à droite et II à l'exergue. Cette monnaie, de coin poinçonné deux fois, prouve bien la réutilisation des coins  de l'émission précédente. Les lettres poinçonnées par les signatores dans le champ du revers à droite ou à gauche de l'effigie, changent entre les deux émissions sans pour cela avoir un changement de type de buste des scalptores.

Pour les officines B, C et D la lettre peut être en position normale à droite ou à gauche, soit en position inversée (lettre rétrograde) comme sur cette monnaie dont trois exemplaires sont répertoriés par P. Bastien. Il ne s'agit en aucun cas d'une erreur de frappe. Par contre, on peut se demander si ces variations ne correspondent pas à des séries différentes dans la même émission, voire à deux émissions différentes. P. Bastien décrit  d'ailleurs dans cette émission un Aurélianus de la deuxième officine (au type TEMPOR FELICIT) portant la marque d'officine B à l'exergue de la monnaie et émet l'hypothèse du début d'une nouvelle émission.


Même type Spes avec la lettre d'officine en position normale et à gauche (RIC n°127 - Bastien n°402)

dimanche 1 août 2010

L'empereur militaire passe en revue ses troupes sur son bouclier. (276 - 277 ap. J.-C.)




Description:

Cyzique, 276-  Début 277 ap. J.-C., 2ème émission, 4ème officine.

Avers : VIRTVS PROBI AVG, (Le courage de Probus Auguste). Buste cuirassé de Probus à gauche avec un casque radié, portant une haste sur l'épaule droite et un bouclier décoré d'une scène d'Adventus sur l'épaule gauche. (Buste Bastien : E)

Revers : ADVENTVS PROBI AVG // Δ . (L'arrivée de Probus Auguste). L'empereur à cheval à gauche, la main droite levée, portant un sceptre de la main gauche et un captif , mains liées devant le cheval. 

Poids : 4,38 g - Diamètre : 22 mm - Axe : 6h00 - Référence : RIC/ n°904

Commentaires :


La titulature d'avers de cette monnaie souligne le courage de l'empereur et rappelle ainsi au peuple les nombreux combats  victorieux menés durant l'année précédente et qui valut à ce général d'être porté au trône par ses troupes. Dès lors, Probus a l'intention de réunifier l'empire romain, dont les frontières qui ne demandent qu'a être renforcées, sont devenues trop perméables aux nombreuses attaques barbares. La diffusion de cette propagande politique des intentions impériales informait le citoyen et montrait un empereur mettant tout son courage au service de la quiétude et de la paix sur le territoire romain.
L'iconographie du bouclier du buste d'avers nous montre Probus passant devant une rangée de soldats, simplifiée ici à l'extrême par les graveurs, choisissant de les symboliser sous forme de  globules. Sur cette monnaie, la cuirasse semble cloutée au plastron et la lance posée sur l'épaule droite de l'empereur se termine par une pointe bien distincte.

L'atelier de Cysique comptait dans ses rangs de véritables artistes produisant une iconographie de grande qualité. Les bustes militaires d'avers sont richement détaillés et présentent des décorations de boucliers et de casques d'une finesse comparable à ceux émis par l'atelier de Serdica.
L'atelier de Cyzique produisit seulement quatre émissions séparées de presque trois années d'inactivité (première émission en 276, deuxième en début 277 puis troisième en 280 et quatrième en fin 281).  Les monnaies d'Adventus, frappées dans cinq officines, notées  A, B, Γ, Δ et E, attestent que l'empereur arrive dans la ville pour cette deuxième émission. En effet, cette monnaie laisse penser qu'une cérémonie avec  distribution de monnaies (donativa) aux citoyens eut lieu à cette occasion. L'atelier est actif durant cette période : il produira de fait  la solde de la soldatesque, l'empereur et son armée passant tout l'hiver dans la ville.  L'atelier fermera  les trois années suivantes lorsque Probus quittera la ville début 277 pour se rendre à Serdica.

 
Détail du bouclier