MARCVS AVRELIVS PROBVS, Empereur Romain de Juin/Juillet 276 ap. J.-C. à Septembre 282 ap. J.-C.


"Tous ceux qui ont parlé de lui ont pris soin d'observer qu'il possédait éminemment dans ses mœurs la probité qu'exprime son nom." Abbé Crevier
n

Bienvenue

Bienvenue à tous les passionnés de monnaies romaines et à tous les novices en numismatique.
Ce blog est destiné à faire découvrir les monnaies romaines de l'empereur PROBUS et permettra d'en connaitre le monnayage dans son ensemble. Au fil des articles, vous y découvrirez les monnaies de ma collection pour lesquelles les commentaires vous éclaireront sur leur iconographie mais aussi retraceront l'histoire passionnante de cet empereur militaire. La publication de monnaies inédites complètera ce travail.
Bonne lecture à tous.

PROBUS COINS

Welcome to all lovers of Roman coins and all numismatic novices. This Blog will explore Emperor PROBUS's Roman coins and understand its currency. Through articles, you'll find these coins in my collection and their reviews will tell you about their iconography, as well as the fascinating history of this military emperor. The publication of unpublished coins will complete this work. Happy reading.

For an english version of this blog, click here !

CARTE DE SITUATION DES ATELIERS MONETAIRES SOUS PROBUS

CARTE DE SITUATION DES  ATELIERS MONETAIRES  SOUS PROBUS

dimanche 31 janvier 2010

Rome éternelle sur un Aurélianus de l'atelier de Rome (277 ap. J.C.)



 Rome, 277ap. J.C. 2ème émission, 1ère officine


Description :

Rome, 277 ap. J.C. 

Avers : VIRTVS PROBI AVG, (le courage de Probus Auguste). Buste de Probus à gauche, caqué, radié, cuirassé, portant un bouclier de la main gauche (décoré de globules), une lance sur l'épaule droite. (Buste Bastien : E).

Revers : ROMAE AETERNAE // R, (à Rome éternelle). Rome assise  tenant une victoire et un sceptre dans un temple à six colonnes. La lettre R pour cette monnaie et RA pour d'autres notent la même 1ère officine. En effet, cette émission compte 7 officines différenciées par des lettres latines et grecques : R et RA, RB, RF, RΔ, RE, Rζ, RZ.
Poids : 4,22g - Diamètre : 23mm - Axe:12h00 - Référence : RIC/n°196

Il n'existe pas pour les graveurs de l'atelier de Rome une période d'adaptation dans la représentation du portrait de Probus comme il y en eut pour les autres empereurs, prouvant ainsi que l'image du général fut diffusée rapidement et de façon calculée. Cette deuxième émission voit aussi la disparition de la marque de la réforme monétaire d'Aurélien notée XXI à l'exergue des revers, qui était présente lors de la 1ère émission.

Commentaires :

Les frappes de l'atelier de Rome sont soignées et de qualité, les bustes richement décorés. Cette représentation de Rome assise dans un temple exalte l'éternité de la ville et tend à prouver que Rome reste la capitale de l'empire. Elle est plus présente dans l'atelier de Rome comme si l'administration romaine désirait montrer la supériorité de l'atelier de la ville éternelle en opposition aux autres.

Rome

La représentation de Rome assise, casquée et tenant un sceptre et une victoire, est inspirée d'une statue installée dans le temple double de Vénus et Rome. Ce temple combinait deux temples accolés dos à dos, dont un était dédié à Vénus Felix, mère d’Enée et l’autre à Roma Aeterna (Rome éternelle). Le temple était construit sur une pente descendante vers le Colisée. Il mesurait 108 m de long et 54 m de large, installé sur une immense terrasse. Deux doubles colonnades bordaient les côtés les plus longs. Chaque temple était couvert d’un toit et précédé d’un portique à colonnes. L’ensemble était entouré d’une colonnade selon la forme classique d’un temple hellénistique.
En 283, les temples ont été endommagés par un incendie et restaurées à partir de 308 ap. J.C. par Maxence, qui  ajouta les absides que l’on voit aujourd’hui et une couverture en voûte. Cette représentation du temple sur le revers est forcément une représentation du premier temple avant l'incendie de 283 ap. J.C., la monnaie ayant été frappée en 277.

Maquette du temple de Venus/Rome et détail du revers

samedi 30 janvier 2010

G - Justification historique de la dynastie des empereurs Illyriens dans le monde romain


Il est des situations dans l'histoire de l'empire romain du IIIème siècle, où la classe dirigeante préféra fermer les yeux sur les difficultés qu'elle rencontrait à asseoir son autorité dans ses différentes provinces et régions. En mettant à mal l'unité romaine, les barbares ne rencontraient que peu de résistance aux frontières, les gouvernants se voilant la face plutôt que de s'attaquer de front aux vrais problèmes de politique de défense territoriale. Déja, les adversaires frontaliers de Rome donnaient du fil à retordre à  l'empereur Gallien et à son armée peu efficace dans ce contexte d'invasions incessantes. Les usurpateurs gaulois (de Postume à Tetricus) luttaient d'une certaine manière contre l'envahisseur de façon locale mais ne réglaient pas le problème général. de la sécurité de l'empire. Il fallait faire cesser rapidement la déliquescence de l'unité territoriale qui s'opérait à une vitesse inquiétante dans l'empire romain. Devant un tel désastre, les empereurs Illyriens vont prendre en charge la destinée du  monde romain et réussir à rétablir pour quelques temps l'unité et la sécurité du territoire romain.

L'Illyrie est un royaume qui s'étend des côtes de la rive orientale de l'Adriatique correspondant à peu près à l'Ouest de la Croatie, de la Slovénie et de l'Albanie actuelle. Ce peuple de souche Indo-Européenne comprenait des Dalmates et des Panonniens. En fait, le terme "Illyriens" était un nom donné à l'origine à une seule tribu mais finit par désigner toutes les tribus linguistiquement et culturellement similaires occupant le territoire au nord de l'Epire et à l'ouest de la Macédoine. Leur culture éclectique, faite d'apport des cultures dominantes grecque puis romaine, n'est pas très développée, ni originale. L'art Illyrien n'a jamais dépassé le niveau d'un simple savoir-faire ni développé un style propre. Durant leur indépendance, les Illyriens passent deux siècles et demi en guerre quasi constante contre les Macédoniens, les grecs, les Epirotes et les Romains. Après la bataille d'Actium (31 av. J.-C.), les anciennes villes libres deviennent des colonies romaines (Dyrrachion,  Byllis). Une communauté de citoyens romains se constitue et le latin s'y développe.  Mais le processus de romanisation se fit vraiment sentir qu'à partir du IIème siècle ap. J.-C. et particulièrement sous les règnes d' Hadrien et d'Antonin le Pieux.
Carte de l'Illyrie

Mais pourquoi Rome, la capitale du monde, dût s'en remettre aux Illyriens pour rétablir sa supériorité et sa puissance plutôt que de nommer des empereurs issus de la capitale ? La vieille souche des empereurs romains était-elle épuisée ou est ce du à un changement politique ?
Il n'y eu aucun complot, ni tentative d'hégémonie sur le monde romain de la part de ces Illyriens ayant obtenu le pouvoir suprême : simplement leur ascension au sommet de la hiérarchie romaine fut le résultat d'une faiblesse et d'une incapacité à fournir des dirigeants à poigne issus de Rome même, témoignant de l'épuisement évident de l'Italie et d'une nouvelle façon de sélectionner les empereurs au sein de l'armée grâce à leurs brillants exploits et leurs capacités à commander. Désormais, c'est l'armée qui choisit  l'empereur parmi ses chefs, le sénat n'ayant pas d'autre choix que d'avaliser la nomination après coup.
Les Illyriens, population saine et rude, bien assimilés dans le monde romain constituaient depuis longtemps déjà une réserve de combattants vaillants dans laquelle on puisait pour recruter des unités de combat militaire  efficaces. Au début simples paysans du Danube, Les Illyriens surent au fil du temps devenir de valeureux soldats de l'armée romaine.  Ils furent  alors récompensés, gravissant les échelons militaires et recevant les honneurs grâce à leur intelligence tactique et surtout leur adresse à combattre à cheval. Certains devinrent officiers, puis ensuite généraux. Il n'y avait qu'un pas pour qu'ils deviennent de bons empereurs ! Ils avaient un solide sens de l'analyse malgré qu'ils n'avaient pas les standards  de l'intelligentsia romaine de l'époque . Ils ne pratiquaient pas la philosophie, ni la poésie grecque comme les empereurs  issus de la nobilitas de Rome. Militaires avant tout, ils jouissaient d'un sens inné à juger les situations, de s'y adapter et montraient à cet égard un patriotisme fervent et sincère. Le soldat romain  commençait à ne plus être nécessairement "romain", mais continuait à être un professionnel à plein temps. Formée de Maures et de Dalmates depuis Trajan et Marc Aurèle, la cavalerie s'enrichit au IIIème siècle des Orientaux (Osrhoeni, Palmyreni, Hemeseni) et des Illyriens dont le courage était  légendaire. De nombreux textes relatifs aux années 250-270 suggèrent l'existence d'une armée mobile de cavalerie et évoquent le rôle militaire et politique croissant du chef unique sous lequel elle aurait été placée. Cette augmentation de la mobilité des troupes militaires et le développement de la cavalerie est la conséquence directe des  nombreuses incursions barbares que subit l'empire.
Ainsi, les Illyriens saisirent l'occasion de faire sortir de leurs rangs des hommes de grande valeur, tous dévolus à la défense de l'empire romain et à la suprématie de la puissance de l'armée.

Claude II le gothique (Marcvs Avrelivs Claudivs)

Le premier Illyrien à prendre le pouvoir après la mort de Gallien fut Claude II le gothique, appelé ainsi parce qu'il combattit les Goths et les Alamans dans les Balkans. Son ardeur au combat était  portée par son intention de défendre l'occident et redonner son éclat à un empire malade sur toutes ses frontières. Malheureusement, il mourut de la peste en 270 ap. J.C. Quintille, le frère de Claude II, était loin d'être à la hauteur de la succession et l'armée l'élimina seulement au bout de 19 jours.

Aurélien (Lvcivs Domitivs Avrelianvs)

Le troisième empereur Illyrien fut Aurélien. Conscient de la menace des invasions prêtes à déborder sur Rome dans un avenir proche, il fit construire en 274 ap. J.C. une enceinte fortifiée de 19 km autour de la ville dont les travaux furent seulement achevés sous le règne de Probus. Cette volonté de résistance par la construction du mur d'Aurélien exprime d'une certaine façon la fragilité potentielle et l'inefficacité militaire de l'armée romaine, incapable de maintenir l'ordre et la paix sur son propre territoire.
Mais Aurélien voulut restaurer la sécurité des citoyens en décidant d'affronter militairement les barbares sur les frontières du Danube ou il remporta des succès notamment sur les Goths, Les Vandales, les Sarmates et d'autres envahisseurs. Il s'occupa ensuite de l'Orient en remportant à Palmyre une victoire sur Vaballathe, le fils de Zénobie, rétablissant ainsi la suprématie romaine de l'Asie mineure à l'Égypte. En Gaule, il élimina l'empereur gaulois Tétricus. Continuant sa lutte contre les ennemis de Rome, il voulut s'occuper de la Mésopotamie mais fut assassiné près de Byzance en Décembre 275 ap. J.C.

Tacite (Marcvs Clavdivs Tacitvs)

Sa succession fut assurée, par la nomination de Tacite par le Sénat, (un vieux sénateur de 75 ans ou un ancien général de l'armée d'Aurélien ?), laissant la surveillance de l'Egypte et de la Syrie au général Probus, le meilleur adjoint d'Aurélien. Il décida d'aller régler avec son frère Florien les problèmes posés par les Goths en Asie mineure. Mais Tacite mourut assassiné en 276 ap. J.C. Les armées déclarèrent Probus empereur en même temps que Florien qui reçut le même titre par le Sénat. Florien se maintint quelques mois, puis fut tué à Tarse, en Cilicie.

Probus (Marcvs Avrelivs Probvs)

Probus, désormais seul nouvel empereur, chef de la cavalerie (des equites, duquel il tire son surnom), aspirait sans doute au retour de la Pax Romana des temps anciens et décida de continuer l'œuvre de "nettoyage territorial" commencé par les empereurs précédents. Les courageux Illyriens ont su  imposer à nouveau la suprématie de Rome sur bon nombre de territoires qui semblaient perdus définitivement. Il est évident que contrairement aux empereurs d'origine romaine, ils ne se souciaient guère de l'art et de la culture sauf pour servir leur propagande. Mais les affaires de l'état les préoccupaient plus que la culture artistique de l'époque. Les citoyens de Rome, protégés par le mur d'Aurélien, continuaient à vivre de la même façon, entourés de fastes, de poésie et de philosophie.

Pendant vingt ans, les empereurs Illyriens se succédèrent en assurant le maintien de la suprématie romaine sur les territoires belliqueux. Mettant un terme aux rébellions et aux usurpateurs de façon courageuse et engagée, les nouveaux empereurs militaires furent indispensable à la sauvegarde de l'intégrité de l'empire qui ne tarda pas être menacé à nouveau.

vendredi 29 janvier 2010

Un Aurélianus inédit de Ticinum de 278 ap. J.C.



 Ticinum, 278 ap. J.C.4eme émission, 4eme officine, inédit RIC n°435 var

Description :

Ticinum, 278 ap J.C.

Avers : IMP C M AVR PROBVS AVG, (L’empereur César Marc Aurèle Probus Auguste), Buste radié de Probus à gauche en nudité héroïque, vu de trois quart en arrière avec l’égide, une haste pointée en avant (Buste Bastien : F19).

Revers : VIRTVS AVG // QXXT, (le courage de l'auguste). Soldat (Mars ?) casqué tenant la victoire dans la main gauche, s’appuyant sur un bouclier et une lance verticale dans la main droite. La lettre Q de l’exergue atteste que cette frappe est issue de la 4ème officine. Les 6 officines se différencient par des lettres et des chiffres romains suivis de XXT : P, S, T, Q, V, VI.
Poids : 3,37gr - Diamètre : 22mm - Axe : 12h00 - Références : RIC/--
 
Ce buste jovien à l’égide n’est pas connu avec cette titulature longue pour cette émission. Il précéderait dans la 4ème émission de Ticinum les types de buste à l'égide (F19) que l’on rencontre plus fréquemment avec la titulature VIRTVS PROBI AVG et VIRTVS PROBI INVICTI AVG. Cet inédit est donc une pièce manquante du puzzle du monnayage de Ticinum.

Commentaires :

Probus part de Lyon au printemps 278 à la tête d’une partie de l’armée pour se diriger vers le Nord et repousser les Germains de la rive gauche du Rhin, en Germanie supérieure. Il y passe le fleuve et poursuit les Barbares depuis Mayence jusqu’au Jura Souabe. Une fois la Gaule libérée, il redescend vers le Sud, passe les Alpes et arrive en vainqueur à Ticinum qu’il n’avait pas eu le temps de visiter à l’aller (Eté 278). Cette émission prépare donc les émissions futures de type de revers VIRTVS INVICTI AVG, VICTORIA GERM et VICTORIA AVG postérieurs à cette nouvelle monnaie.
La représentation de Virtus au revers encense encore une fois, l'armée romaine et la bravoure du Général empereur. Quelle meilleure symbolique pour rassurer les romains sur le devenir de Rome que ce soldat tenant dans la main une victoire le couronnant, alors que l'empire se voit fragilisé sur toutes ses frontières ! Cette idée de la Rome éternelle vient à point servir les empereur Illyriens, issus d'une culture différente et moins sophistiquée que celle de Rome. En effet, la succession de ces empereurs Illyriens depuis Claude II, bien assimilés à la culture Romaine, occupe un vide dynastique car Rome ne trouve plus de successeurs valables en Italie.

 Virtus portant la victoire au revers

samedi 23 janvier 2010

La protection divine de PROBUS


Voici une présentation succinctes des dieux rencontrés le plus fréquemment sur le monnayage de Probus pour lesquels l'iconographie est la plus abondante. La régularité de leurs représentations à cette période atteste que ces divinités occupaient une place plus importante que les autres dans la religion romaine. En effet, l'empereur avait coutume de se mettre sous la protection des dieux les plus influents et de le faire savoir sur ses monnaies. Comparable à un phénomène de mode, la prédominance de certains dieux évoluait dans la religion selon les croyances de l'empereur en place ou grâce aux récentes conquêtes territoriales amenant aussi leurs lots de nouvelles divinités. La religion était sujette à une perpétuelle évolution en étroite liaison avec la politique de l'empereur.


Différentes représentations de Sol dans son quadrige pour Rome et Serdica

Sol Invictus :

La représentation de Sol invictus sur les types de revers des différents ateliers monétaires  de Probus est quasi permanente dès le départ du monnayage. Ce culte prend une place  importante  au IIIème siècle dans les croyances du paganisme de l'époque. Introduit à Rome par Titus Tatius, le premier roi Sabin, en même temps que le culte de la lune, la famille des Aurelii passait pour avoir exercé le culte du soleil dont ils étaient descendants. Probus vouait une grande admiration pour Aurélien qui avait réintroduit le dieu solaire au même rang que Jupiter dans le panthéon du paganisme romain. C'est sous le règne d'Aurélien et ses successeurs que le culte de Sol invictus, englobant de façon syncrétique tous les cultes solaires de Syrie et d'ailleurs, va connaitre un nouveau développement important qui  donnera  une image politique commune à tous les territoires de l'empire. Il n'y a pas mieux qu'une divinité connue et adorée de tous pour rassembler les peuples et recréer une unité d'action et de pensée à des territoires disparates. Rappelons qu'a ce moment la, le sacré et la politique était en parfaite adéquation et complémentarité.
Sol est représenté de diverses manières : déjà évoqué par la couronne radiée coiffant les bustes de l'empereur à l'avers, on retrouve Sol sur les revers par des portraits en pied, ou simplement évoqué lors d'une scène cultuelle ou bien encore avec Probus mais aussi en quadrige. Ce même quadrige offre plusieurs types caractéristiques du monnayage : une image de profil dans un quadrige bondissant et une image de face sur une représentation synthétique et symétrique d'un quadrige dit "éclaté".


Jupiter sur un Aurélianus de Rome

 Jupiter :

Le grand dieu du panthéon romain, nommé Jupiter (Zeus pour les grecs), à l'origine Latial honoré dans la forêt de Monte Calvo, devint par la suite le  dieu le plus puissant de la religion de Rome. Dieu du ciel et de la terre, ancienne divinité Etrusque, Jupiter est d'abord vénéré comme le dieu des phénomènes atmosphériques. Par la suite, les romains lui attribuèrent de nombreuses autres fonctions comme le révèlent un grand nombre de surnoms qui le qualifient.
Son temple fut construit sur le sommet du Capitole, lieu jadis recouvert de chêne, sur lequel les bergers faisaient paitre leurs troupeaux. Avec sa fille Minerve et son épouse Junon, il formait la triade capitoline, protégeant l'intégrité de Rome et garantissant la stabilité de l'état romain. Lorsque les consuls prenaient leurs fonctions, ils priaient Jupiter Optimus Maximus. Jupiter devint un dieu politique, garant des lois et des traités, légitimant les guerres et les conquêtes que décidaient le Sénat ou l'empereur. Il incarnait ainsi l'unité religieuse et sociale de l'empire, unissant les cités du monde romain dans lesquelles on trouvait un temple dédié à sa personne.
Le dieu des dieux, nu ou en toge, portant un foudre, un sceptre est souvent représenté sur les monnaies de Probus offrant un globe ou une victoire, symbolique du pouvoir et de l'approbation divine de la prise de pouvoir et des guerres de l'empereur. Le dieu approuve et protège en même temps.


Différentes représentations de Mars pour l'atelier de Lyon et de Ticinum

Mars :
 
A Rome, Mars était essentiellement un dieu guerrier, dieu de la légion romaine à qui on consacrait les jeunes générations de combattants. On trouve son origine en Grèce sous le nom d'Arès, mais ses débuts cultuels  romains se situent en Italie centrale et méridionale, de l'Ombrie à la Lucanie. Honoré par l'empereur pour ses vertus militaires, dieux de la guerre par excellence, sa protection  lui donnait la force, la victoire et la bravoure au combat. Son culte a son centre à Rome au Palatin et sa diffusion suivit naturellement les progrès de la conquête. Il personnifie le génie conquérant de son peuple mais veille aussi à la prospérité des campagnes (étant aussi le dieu de la végétation). Guidant la jeunesse, le picvert  et le loup sont les animaux consacrés à Mars. Si Jupiter est devenu le génie de tutelle du peuple romain, il n'en est pas moins vrai que les destinées de l'empire dépendent surtout du dieu des armes et de la guerre. Son nom est associé à tous les souvenirs glorieux de Rome et de ses empereurs. Il trouve naturellement une place de choix sur les monnaies de Probus, cet empereur militaire victorieux de nombreuses guerres, installant la paix dans l'empire. Ses représentations le montrent nu, casqué, marchant, tenant le parazonium, un trophée sur l'épaule ou une enseigne ou bien encore s'appuyant sur un bouclier.

Hercule avec ses attributs sur une monnaie de Ticinum

Hercule :

Héraclès, un des grands héros de la Grèce antique, nommé Hercule par les Romains, célèbre par ses travaux est associé à un grand nombre d'évènements civilisateurs. Il est aussi le dieu de la guerre que l'on invoque en allant au combat, sauveur, secourable, qui écarte les dangers, conjure les mauvais destins et délivre l'homme des maux qui peuvent l'atteindre. Il est considéré à la fois comme un héros et comme un dieu. Il est le messager des dieux, incarne la force physique, porteur d'enseignement et de bons conseils, il est aussi le compagnon de l'empereur trouvant en lui un conseiller de choix et un dieu protecteur de l'empire. Souvent associé à la victoire, on lui rend hommage durant les cérémonies de triomphes. Il est  représenté sur les monnaies nu, debout, avec sa massue et la peau du lion de Nemée .

La politique et la religion ont toujours eu des liens très étroits dans l'action des grands hommes romains. Les divinités accompagnant Probus ont presque toutes un rapport avec la victoire et la guerre. En mettant ainsi ses décisions politiques sous la protection de divinités reconnues et adulées du peuple romain, il justifiait par les revers de ses monnaies son ardeur au combat et l'approbation divine du panthéon romain.

mercredi 20 janvier 2010

Les premiers portraits de PROBUS par l'atelier de Tripolis (276 ap. J.C.)


276 ap. J.C., 1ère émission, 2ème officine

Description :

Tripolis, 276 ap. J.C.

Avers : IMP C M AVR PROBVS AVG, (L'empereur César Marc Aurèle Probus Auguste). Buste de Probus radié, drapé et cuirassé à droite, vu de 3/4 arrière. (Buste Bastien : A2)

Revers : CLEMENTIA TEMP// croissant // KA, (La clémence des temps). Probus et Jupiter debout face à face, l'empereur à gauche en habit militaire, tenant un sceptre court (scipio) et recevant un globe de Jupiter nu à droite, tenant un sceptre long, le manteau sur l'épaule.

Poids: 4,00g - Diamètre: 22mm - Axe : 6h00 - Références : RIC/ n°927.


Commentaires :

Les ateliers d'Antioche et de Tripolis frappent les premiers portraits de l'empereur avec l'unique légende CLEMENTIA TEMP : ce revers est d'ailleurs le dernier  frappé par Tacite dans ces deux ateliers orientaux. Après la mort successive de Tacite et Florien et les invasions barbares menaçant l'intégrité de l'empire, cette légende se veut apaisante et rassurante pour le citoyen romain qui découvre encore un nouvel empereur. L'iconographie rappelle que Jupiter donne la puissance et sa protection à ce nouveau gouvernant, qui tient aussi à asseoir sa légitimité à Rome par une ratification sénatoriale de ses pouvoirs.

Le monnayage sous Probus de l'atelier de Tripolis n'est pas très abondant. Cet atelier ne compte que deux émissions en 276 et en 280 pour seulement trois officines (*, croissant, T). L'étoile est le symbole solaire, le croissant le symbole lunaire (remplacé par une couronne pour la 2eme émission) et le T note la "Tertia officina". La réforme monétaire est notée par le sigle grec KA pour la première émission et par les lettres latines XXI pour la deuxième.
Le traitement du portrait comporte quelques particularités de gravure : la chevelure, l'oreille et  l'arcade sourcilière sont traitées de façon grossière et rude.
Florien vient d'être assassiné en Turquie et Probus se trouve sans doute encore en Syrie avec ses troupes. Lorsque Probus décide de partir avec son armée pour Rome la même année, l'activité des ateliers d'Antioche et de Tripolis est suspendue car l'empereur ne laisse aucune troupe en Orient. Il n'est donc plus nécessaire de fournir du numéraire destiné à payer les militaires si les garnisons ne sont plus à proximité.
L'activité de Tripolis ne reprendra que trois ans plus tard lorsque Probus passe par la ville pour aller en Égypte combattre les Blemmyes. Cette deuxième émission est considérée comme une émission d'appoint seulement destinée à seconder l'atelier d' Antioche.

Première représentation de Probus

lundi 18 janvier 2010

L'entente des armées de PROBUS à l'atelier de Cyzique (280 ap. J.C.)


Cyzique en 280 ap. J.C., 3ème émission, 5ème officine



Description :

Cyzique, 280 ap. J.C, 3ème émission, 5ème officine.

Avers : IMP C M AVR PROBVS AVG, (L'empereur César Marc Aurèle Probus Auguste). Buste radié, drapé et cuirassé de Probus à droite.

Revers : CONCORDIA MILITVM // V // XXIMC, (L'entente des armées). La victoire à gauche tenant de la main gauche une palme et couronnant de l'autre main l'empereur à droite tenant une lance.
Poids : 3,88g - Diamètre : 22mm - Axe : 12h00 - Références : RIC/ n°908

Commentaires :

Cyzique est un atelier de production monétaire par intermittence ayant produit quatre émissions. On note ainsi deux grandes périodes :
La première période, comptant les deux premières émissions, s'étale durant l'année 276 jusqu'au début 277 ap. J.C. pendant laquelle Probus est présent dans la ville. Il y passe d'ailleurs l'hiver et repartira au début de l'année 277 pour se rendre à Serdica. L'atelier compte cinq officines notées P, S, T, Q, V au revers des monnaies ;
La deuxième période, comptant encore deux émissions, arrive après une suspension d'activité de presque trois ans en 280 ap. J.C., quand Probus réinstalle une partie de son armée à Cyzique. Cette deuxième phase d'émission continuera jusqu'en 281 ap. J.C. L'atelier compte alors sept officines marquées de lettres grecques A, B, Γ, Δ, ε, ζ, Ζ.  Ces deux émissions se caractérisent par la présence des lettres CM ou MC (Moneta Cyzici) sur le revers des monnaies.

L'atelier se caractérise par la finesse de ses bustes attestant de la grande qualité de ses graveurs.
La légende de revers CONCORDIA MILITVM célèbre la réinstallation de l'armée dans la ville et l'iconographie glorifie la réussite de l'empereur après sa victoire sur les peuples barbares, les derniers vaincus étant les Thraces. Il prit ensuite le départ pour Serdica, puis pour l'Égypte continuant la mise en sécurité des  territoires de l'empire en écrasant les Blemmyes.

Détail de la scène de revers

mercredi 13 janvier 2010

10 - PROBUS sous la protection de Sol sur un Aurélianus de l'atelier deTicinum (276 ap. J.C.)


Ticinum, 276 ap. J.C, 2ème émission, 3ème officine.

 
Description :

Ticinum, 276 ap. J.C.

Avers : VIRTVS PROBI AVG, (La bravoure de Probus Auguste), buste de Probus radié, casqué, cuirassé à gauche, portant un bouclier à gauche et une lance sur l'épaule droite. (P. Bastien : buste E1).
Revers : CONSERVAT AVG // TXXT, (Le protecteur de l'Auguste),  Sol nu debout à gauche, la chlamyde recouvrant l'épaule gauche, un pan reposant sur le bras, portant un globe de la main gauche, la main droite levée.
Poids : 3,62g - Diamètre : 22mm - Axe : 6h00 - Référence : RIC/n°351

Commentaires :

Cette légende de droit flattant son courage met en avant le caractère militaire et brave de Probus. En effet, le représentant en habit militaire, cette monnaie renvoie à ses utilisateurs l'image d'un empereur chef militaire. L'année de l'émission (277 ap. J.C.) Probus est en marche vers Rome pour aller faire ratifier sa nomination à la tête de l'empire. 
Le culte de Sol, dieu  adoré par les soldats de Probus, prédomine en Illyrie. Quelques années auparavant, Aurélien introduisit le culte de "Sol Invictus" (le soleil invincible) à Rome en créant un collège de Pontifes afin d'éviter toutes dérives religieuses. C'est ainsi que l'empereur Probus se met sous la protection des dieux les plus influents de l'époque, c'est à dire Jupiter et Sol. Cette iconographie de Sol, sera très fréquente dans ce monnayage et pour beaucoup d'ateliers. 
L'atelier de Ticinum fut très actif pendant tout le règne de Probus. Il se divisait en six officines P, S, T, Q, V, VI pour lesquelles on compte dix émissions de 276 à 282 ap. J.C. La septième émission commence le codage AEQVIT pour cet atelier. De la huitième à la dixième, le code est EQVITI, comme je l'ai déjà signalé dans un précédent article expliquant le signum.


Détail du buste en habit militaire.

lundi 11 janvier 2010

9 - Un Aurélianus poids lourd de PROBUS de l'atelier de Lyon (282 ap. J.C.)


Atelier de Lyon, 282 ap. J.C., 9ème émission, 1ère officine
Description :

 Lyon, 282 ap. J.C.


Avers : IMP C PROBVS•P•F AVG (l'Empereur César Probus Pieux et Heureux Auguste). Buste de Probus radié et cuirassé à droite. (Buste Bastien :B)

Revers : COMES AVG // A (le Compagnon de l'Auguste). Minerve debout à gauche, casquée et drapée tenant un rameau d'olivier de la main droite et une lance ainsi qu'un bouclier de la main gauche .
Poids : 6,10 g - Diamètre: 22 mm - Axe : 12h00 - Référence : RIC/ n°116  - Bastien : 375.

Lyon, capitale des Gaules, a connu deux grandes périodes d'activité de son atelier monétaire : la première se situe durant le haut-empire, entre Auguste et Clodius Albinus et la deuxième période commence avec les empereurs militaires, d'Aurélien jusqu'en 413 ap. J.C.
Cet atelier est divisé en quatre officines pour le monnayage de Probus. On compte neuf émissions effectuées entre Octobre 276 et Août 282 ap. J.C. Cette monnaie de 282 ap. J.C. de la 9ème émission marque une rupture pour l'atelier : il s'agit de l'abandon du système de chiffres romains (I, II, III, IIII) notés à l'exergue des monnaies. En effet seule la 9ème émission, comporte un système alphabétique romain A, B, C et D, lettres placées dans le champ de la monnaie, notant les quatre officines de Lyon. Sur les neuf émissions de l'atelier, seule la dernière est notée avec ces lettres.
La représentation de Minerve au revers est classique pour l'atelier et le monnayage : Minerve était la fille de Jupiter, assimilée à la déesse grecque Athéna, introduite à Rome par le roi Numa, elle fait partie de la triade Capitoline avec Jupiter et Junon. Elle illustre la sagesse, la pensée supérieure et l'intelligence. Ainsi associée à l'empereur se plaçant sous sa protection, elle reflète les traits de caractère d'un homme sage que les auteurs anciens nous ont rapportés.

Commentaires : 

Cette monnaie est d'un poids exceptionnellement lourd pour un Aurélianus de Probus. En effet les Auréliani sont taillés au 1/84ème de la livre romaine, soit d'un poids de 3,86 g et ce depuis la réforme monétaire menée par Aurélien à la fin de l'année 274. Ces monnaies de poids supérieur à la moyenne sont plus rares que les autres de même type. Il existe  d'ailleurs plusieurs théories pour expliquer l'existence de ces monnaies de poids exceptionnel : 
Un premier précepte nous apprend que ces monnaies étaient émises à l'occasion de Donativa, distribuées à la foule lors de l'arrivée de l'empereur dans une ville (Adventus), ou bien lors de la célébration d'un triomphe, ou encore lors d'autres réjouissances diverses. Ces monnaies offertes ainsi à la foule, étaient une sorte d'obole donnée par l'empereur à son peuple, symbole du partage de la richesse et de la joie de la victoire.
Une autre conception plus cartésienne explique ces écarts de poids entre les flans du fait que l'on utilisait une livre  romaine (soit 324,66 g) de métal pour confectionner 84 flans pour "battre monnaie" (réforme monétaire d'Aurélien). Que les flans soient de même poids n'importait guère. Il fallait simplement que le nombre de  flans soit égal à 84. 
La deuxième théorie me paraît plus plausible, sachant que les frappes exceptionnelles de quinaires d'or ou de deniers (en bronze) étaient faites à l'occasion des réjouissances et distribuée lors du passage de l'empereur.


Minerve et ses attributs


dimanche 10 janvier 2010

8 - Répertoire iconographique des décorations de boucliers sur les bustes militaires des auréliani de PROBUS.



En ce dernier quart du IIIème siècle, les faiblesses politiques de l’empire romain ont engendré une situation instable. Les empereurs successifs régnant sur l’ager romanus, construit comme un véritable puzzle, résultat de rattachements successifs de territoires résolus à l’unité romaine, connaissent depuis le début du siècle d’énormes difficultés à installer durablement une cohésion territoriale et une paix sociale tant espérée par la population. Un climat d’insécurité, sans cesse entretenu par les incartades des peuples barbares aux différentes frontières, entrave la prospérité économique d’un empire trop étendu pour rester stable sans être soumis à une surveillance accrue de ses limes.
  Bouclier atypique sur lequel les globules sont remplacés par des pointes.

Au mois de septembre 276 ap. J.-C., Marcus Aurelius Probus est déclaré empereur par ses propres troupes. Issu de la lignée des empereurs militaires illyriens, il s’emploiera avec succès tout au long de son règne à poursuivre l’œuvre de sécurisation de l’empire commencée depuis Aurélien. Combattant les Goths en Pannonie, repoussant les Francs et les Alamans en dehors des provinces gauloises, il fortifiera la ligne de défense du Rhin. Vainqueur des Vandales et des Burgondes sur le fleuve Lech, les repoussant au delà du Danube, il enchainera avec autant de détermination les campagnes de Pannonie, Mésie et Thrace au cours desquelles il vaincra les Sarmates et les Gètes. Mettant fin au brigandage en Isaurie et en Pamphilie, Probus  repoussera aussi les attaques des Blemmyes en Egypte. Cette succession de campagnes militaires victorieuses démontrent  l’extrême détermination de cet empereur à installer la paix durablement sur tout le territoire romain.
L’aurélianus, né de la reforme monétaire d’Aurélien en 274 ap. J.-C connait alors une libération des types de bustes dits « exceptionnels » jusqu’alors presque exclusivement réservés au monnayage d’or des empereurs précédents. Probus utilisera largement le support monétaire et le transformera en un véritable outil de propagande politique destiné à rallier habilement la population à sa juste cause et par la même tentera de motiver son armée engagée à ses côtés dans les différentes batailles contre l’envahisseur. Destinés à payer la solde des troupes et à être utilisés par la population subissant depuis de trop nombreuses années les conséquences des invasions barbares, les graveurs  mettent en avant la virtus militaire de leur empereur, commandant en chef des armées, non seulement sur le revers mais aussi sur le droit des auréliani. Les bustes « militaires » présentant Probus radié, cuirassé, casqué, portant une haste sur l’épaule et un bouclier, souvent accompagnés d’une titulature emphatique, occupent une place considérable dans le monnayage de la période. C’est ainsi que les scalptores des différents ateliers monétaires portent le message politique dans le détail jusqu'à orner les boucliers des bustes militaires avec des motifs allégoriques, mythologiques ou des scènes militaires rappelant les qualités pugnaces de l’empereur.
Le bouclier apparaît tardivement sur les bustes monétaires impériaux : Septime Sévère semble le premier empereur à être représenté avec cet attribut. Sa représentation sur les bustes monétaires restera singulière jusqu'aux règnes de Valérien et de Gallien pendant lesquels ils connaissent une utilisation plus régulière. Le casque se rajoute alors à une haste ou un sceptre. La couronne radiée, différenciant l'antoninien des autres modules, s’empilera sur le casque. Le bouclier tel qu’il est représenté sur les monnaies ne semble pas être uniquement une arme défensive mais parait être un bouclier de parade, porté par l’empereur lors des cérémonies de triomphe ou d’adventus,  symbolisant de fait sa valeur et son rang militaire. Ces bustes militaires témoignent d’une réelle évolution du statut de l’empereur romain. Il ne  commande plus ses troupes à distance, confortablement installé dans les fastes de son palais romain, mais il s’engage sur le terrain des opérations militaires, dirigeant son armée au cœur des conflits.
Cette étude de l'iconographie des détails ornant les boucliers des bustes militaires des  auréliani de Probus permet de percevoir une volonté accrue d’affirmer la domination impériale sur l’ensemble du monde romain. Tous ateliers confondus, les motifs à la gloire de l'empereur, scènes militaires, inscriptions votives, représentations mythologiques ou formes géométriques pures, font l'objet ici d'une étude complète répertoriant toutes les variantes d’ornementations, de forme et de position des boucliers rencontrés dans l’ensemble du monnayage de billon de Probus.
Nous ne considérons pas dans cet article les bustes héroïques portant l’aegis, attribut trop souvent confondu avec un bouclier. L’égide, peau de chèvre sacrée directement sanglée sur la poitrine de Probus, n’est pas un bouclier proprement dit mais plutôt un symbole de la protection divine.

Les différentes formes du bouclier :

Le bouclier le plus fréquemment représenté sur les bustes du monnayage de Probus est de forme ovoïde, avec ou sans bordure décorée.  Il n'est reproduit en général que par la moitié de sa surface totale, couvrant généralement l’épaule gauche de l’empereur. Il offre ainsi aux graveurs la liberté d’y insérer un motif d’ornementation bien visible au premier plan. Sur d’autres auréliani, on peut rencontrer des boucliers  circulaires de grand format tenus en position antérieure. Cette forme circulaire rappelle le bouclier argien, décrit par les auteurs grecs, mais pourrait être aussi emprunté à la culture étrusque. De plus petits boucliers circulaires font allusion au clipeus, appelé aussi le parma, portés par les chevaliers et les troupes légères de l'armée romaine.

Petit bouclier de forme circulaire, seul type représenté en entier.

Les différentes positions du bouclier :

Le type le plus fréquemment utilisé montre la face externe du bouclier, tenu alors par la main gauche sur les bustes à gauche (l'inverse sur de rares bustes à droite), masquant l'épaule, le plus souvent associé à une lance posée sur l’épaule droite. Quelquefois, un grand bouclier circulaire est projeté en avant, modifiant la position de l’empereur et conférant à ce type de  buste un caractère plus offensif. Sur de rares types de bustes militaires, nous pouvons voir la face interne du bouclier, laissant quelquefois apparaître la main tenant la poignée ou encore des rivets sur le pourtour.

Bouclier projeté en avant vu en face externe, orné de globules.


Les différents ornements de bouclier :

  Bouclier à 10 globules

1- Les boucliers ornés de globules :
 
Ces motifs géométriques constituent le  type le plus couramment rencontré sur les boucliers des bustes de Probus. Il semble évident que ces globules sont le résultat de simplifications successives d'un type similaire sur lequel l'iconographie est plus évidente à interpréter : cet autre type associé présente clairement des rangées de soldats portant des boucliers stationnés en formation militaire. Pour différencier  les variantes de boucliers à globules, il paraît plus judicieux de compter le nombre de globules présents sur la partie basse du bouclier, c'est-à-dire la partie la plus large de la représentation. Nous pouvons ainsi comptabiliser sur les différents exemplaires rencontrés de quatre à treize globules alignés. Le cas particulier du bouclier à un seul globule central, quelquefois bordé de deux lignes parallèles, ornées d'une rangée de points, est à considérer comme une représentation de l'umbo, bosse médiane et saillante fixée sur la face externe de cet attribut.


Rangées de soldats avec boucliers

 2- Les boucliers avec motifs géométriques :
    • Les boucliers avec une rosace : ce type est beaucoup plus rare dans le monnayage de Probus. Il représente une rosace offrant quatre formes ovales et très allongées, centrée sur un globule. Plus ou moins agrémenté de motifs (étoiles, points, guirlandes), il est difficile d'interpréter ce type de bouclier dont l’ornement semble avoir un rôle purement esthétique. Pierre Bastien émet l'hypothèse dans son ouvrage sur les bustes monétaires que cet ornement particulier séparant en quatre parties égales la face externe du bouclier, pourrait symboliser les quatre éléments de l'univers. Ces éléments se rencontrent symbolisés par ailleurs par les chevaux du quadrige de Sol, divinité majeure de l’empereur.

    Rosace séparant le bouclier en quatre
    •  Les boucliers avec décorations linéaires : assez rares, ces traits et ces points constituent à mon sens un ornement géométrique purement décoratif d’un bouclier de parade, tournant autour d'un globule central.
       
      Lignes et points décoratifs

      3- Les boucliers avec scènes militaires à la gloire de l'empereur :

      Le bouclier devient ici un élément narratif de la vie militaire de l’empereur auprès de ses soldats, mettant en avant son courage et son sens du commandement militaire. Nous différencions dans cette catégorie deux scènes militaires récurrentes du monnayage :
      •  L’Adventvs : cet ornement de bouclier met en scène l'empereur à cheval se dirigeant vers la droite, tenant une lance et passant devant une ou plusieurs rangées de soldats. Les personnages du premier plan sont quelquefois simplifiés et représentés sous forme de globules. Nous pouvons penser qu'il s'agit d'une scène de triomphe de l'empereur après un combat victorieux, passant ses troupes en revue ou bien encore une référence à un adventvs à la suite d'une campagne militaire.
       Scène de l'empereur passant devant des soldats simplifiés sous forme de globules.
      • La Virtvs : une scénographie nous montre un cavalier terrassant de sa longue lance un ennemi allongé. Il s'agit encore d’une représentation de l'empereur au combat sur son cheval. Cette iconographie glorieuse nous narrant les exploits militaires de Probus est également employée sur le revers de certaines monnaies, accompagnée de la légende VIRTVS PROBI AVG, mettant en avant les qualités militaires de l’empereur. D’autres monnaies présentent une scène de combat militaire encore jamais décrite sur lesquelles nous distinguons au premier plan des soldats, armés de lances et de boucliers ovoïdes, avançant en ligne pour aller affronter un autre groupe de combattants, situé en haut du bouclier. Cette scène souligne l'ardeur au combat de l'armée  romaine menée par son empereur, chef militaire juste et habile tacticien.
      Scène atypique de combat entre soldats

      4- Les boucliers avec représentations mythologiques  :
        
      Par ce thème d’ornement, l’empereur et son armée se mettent sous protection divine. 
      • La gorgone (ou gorgonéïon) : certains bustes de Probus nous offrent un bouclier orné d'une tête de gorgone en son centre, plus ou moins décoré sur le pourtour. L'apparition du gorgonéïon sur les cuirasses des bustes monétaires comme sur les boucliers semble avoir la même valeur que celle de l'égide,  emblème du pouvoir universel transmis par Jupiter. Pierre Bastien pense qu’à partir de l'époque de Gallien, le gorgonéïon, attribut d'Apollon, est aussi lié au pouvoir de Sol et pourrait donc avoir ici un rapport direct avec la divinité tutélaire de Probus.

        Tête de gorgone centrée sur le bouclier

        • Pégase : cette autre figure mythologique présente sur les boucliers de Probus, vole à droite. Divers motifs décoratifs peuvent encercler Pégase. Sa présence pourrait être une allusion aux chevaliers dont le corps, crée par Gallien, fut commandé par Probus (Equitius Probus). La virtvs impériale est alors encore une fois exprimée par l'intermédiaire de cette évocation de la cavalerie.

           Bouclier orné de Pégase volant à droite


          5- Les boucliers votifs avec inscription "VOTIS X ET XX" :

          Nous ne connaissons qu’un seul type de bouclier avec l'inscription VOTIS X ET XX. Un autre exemplaire nous présente Probus radié mais non casqué. Ce buste avec bouclier particulier fut sans doute émis à l’occasion de la célébration des dixièmes et vingtièmes vœux de l'empereur, glorifiant ainsi ses qualités militaires.

          Bouclier votif
           
          6- Les boucliers avec couronne de laurier :

          un autre type fort rare, traduisant la puissance souveraine de cet empereur militaire, connu qu'à seulement deux exemplaires, présente une couronne de laurier pointée par un globule central.



          Les boucliers des bustes monétaires de Probus deviennent le siège de représentations diverses, parfois divines, voire cosmiques tendant à exprimer la  virtvs militaire de l'empereur et de son armée afin de l’inscrire dans l’inconscient du peuple romain. Ces motifs trop souvent négligés dans les descriptions des auréliani sont pourtant des indicateurs essentiels de la propagande impériale et du génie des graveurs  des divers ateliers de la période.

          vendredi 8 janvier 2010

          F - L'assassinat de PROBUS par son armée à Sirmium (Septembre 282 ap. J.C.)


          Durant cette année 282 ap. J.C., Probus se préparait à commencer une campagne militaire contre les Perses afin de venger Valérien. Il prit la route de l'Illyrie où il fit quelques étapes pendant que ses forces militaires se rassemblaient.
          Durant son séjour à Sirmium en septembre de la même année, ne voulant pas laisser ses troupes inactives encore une fois, il entreprit de faire assécher des marais aux abords de sa ville natale en faisant creuser un canal qui acheminerait l'eau jusque dans la Save. Il donnerait ainsi de nouvelles terres labourables aux habitants de Sirmium grâce au travail de ses légions.
          Mais les soldats se mutinèrent car les travaux étaient harassants et le climat torride à cette époque de l'année. Des rumeurs circulaient déjà, affirmant que Probus disait de façon sérieuse que bientôt l'empire n'aurait plus besoin de soldats, ce qui paraît peu plausible car Probus se préparait à affronter les Perses. Mais ces colportages étaient sans doute lancés par quelques soldats ambitieux, tel que Carus qui lui succèdera. On reprocha d'ailleurs par la suite à ce dernier de s'être frayé le chemin menant au trône par le biais du crime.

          Devant la colère montante de ses troupes lors de l'inspection des travaux, constatant qu'ils n'avançaient guère, Probus n'eut d'autre solution que de prendre la fuite, sentant la menace monter autour de lui. Il voulut se réfugier dans une tour fortifiée qu'il avait fait construire pour observer lui-même ce qui se passait dans tous les territoires environnants. Hélas ! Les assassins le rattrapèrent avant qu'il eut pu gagner cet asile et le tuèrent.

          A l'annonce de sa mort, le Sénat et le peuple en furent très affectés et regrettèrent fortement cet assassinat. L'armée même se reprocha très vite après-coup d'avoir tué ce héros. Comme pour se repentir de ce geste meurtrier, les soldats lui dressèrent un tombeau magnifique avec cette inscription sculptée sur le marbre :

          "Ci gît l'empereur Probus, homme probe s'il en fut, vainqueur de toutes les nations barbares et vainqueurs des tyrans.".

          Aurélianus de Carus de Lyon de 282 ap. J.C. 3ème émission, 2ème officine RIC n°12

          Ayant appris que le préfet du prétoire Carus, responsable de la défense en Occident s'était fait déclarer empereur en l'absence de Probus, l'armée décida de se ranger sous ses ordres. Carus fit mourir les assassins de Probus et rendit les plus grands honneurs à sa mémoire et le mit même au rang des dieux. 
          Les descendants de Probus quittèrent Rome et allèrent se fixer en Italie dans les environs de Vérone, de Benacum et Larium.

          Constamment victorieux, depuis sa jeunesse jusqu'à sa mort, homme sans reproche au très grand génie militaire, étant aussi courageux qu'Aurélien, mais plus respectueux de son armée, aussi modéré que Marc Aurèle mais plus apte à la guerre, ne transigeant jamais les lois, employant les armes que par nécessité, grand général et prince attentif à satisfaire le peuple, toujours occupé de projets utiles au bien public, Probus réunissait toutes les qualités d'un grand empereur romain. Au cours de son règne, il rebattit ou répara 70 villes et forma au sein de son armée des généraux ambitieux comme Carus, Dioclétien, Maximien Hercule et Constance Chlore.

          E - Le triomphe de PROBUS à Rome (281 ap. J.C.)


          Les révoltes des usurpateurs endiguées, les frontières de l'empire sécurisées, Probus décida de rentrer à Rome afin d'organiser les festivités de son triomphe, ramenant avec lui ses nombreux butins de guerres .
          Il offre ainsi aux Romains de magnifiques fêtes en Juin 281 ap. J.C. : il fit précéder son char de groupes de cinquante captifs de toutes les nations qu'il avait soumises à l'obéissance romaine. Il donna au Colisée un spectacle de chasse somptueux où le gibier était laissé à disposition du peuple. Les dépenses exorbitantes occasionnées par les fêtes des empereurs victorieux étaient indispensables pour satisfaire le peuple dont le droit le plus ancien était d'être amusé par ses maîitres.
          Volpiscus nous en donne d'ailleurs une description précise :

          "De grand arbres furent arrachés avec leurs racines par les soldats et furent fixés sur un assemblage de longues poutres liées entre elles en long et en large, et qu'on recouvrit de terre : le cirque tout entier, planté d'arbres dans tout l'éclat de leur verdure, offrait ainsi l'aspect merveilleux d'une forêt. On lâchat ensuite par toutes les avenues mille autruches, mille cerfs, mille sangliers, mille daims, des ibis, des brebis sauvages et autres animaux herbivores autant qu'on put nourrir ou plutôt qu'on put trouver. Puis on donna accès au peuple et chacun prit ce qu'il voulut.
          Un autre jour, il fit lancer en même temps dans l'amphithéâtre cent lions à longue crinière. Ces animaux, dont les rugissements étaient comparables au bruit du tonnerre, furent tous tués au sortir des loges souterraines, mourant sans donner de grandes marques de courage : ces bêtes n'avaient pas la fougue qu'elles montrent ordinairement quand elles sortent des voûtes grillées ; plusieurs même qui ne voulaient pas quitter les loges, furent tuées à coup de flèches. Parurent ensuite cent léopards de Libye, cent de Syrie, cent lionnes et trois cents ours en même temps : le spectacle de tous ces animaux féroces fut plutôt merveilleux qu'agréable. Enfin furent introduit trois cents paires de gladiateurs, parmi lesquels combattirent plusieurs Blemmyes, plusieurs Germains et Sarmates et même quelques brigands Isauriens qui avaient précédé le char triomphal de Probus.".

          On raconte qu'a cette occasion 80 des 600 gladiateurs prévus pour combattre dans l'arène refusèrent d'aller s'étriper pour le seul amusement du peuple. Après avoir tué leurs surveillants, les révoltés allèrent semer la panique dans les environs de Rome, ravageant et pillant tout ce qu'ils trouvaient. Ils entrainèrent dans leur épopée d'autres hommes mal intentionnés si bien que Probus fut obligé d'envoyer les troupes régulières à leurs trousses. Ils les rattrapèrent facilement et se firent tous massacrer.


          Rome, 280 ap. J.C., 5ème émission, 6ème officine, RIC n°214

          Probus marqua son triomphe en donnant  le droit  de planter de la vigne aux Gaulois, aux Espagnols et aux Pannoniens ; il levait ainsi la défense appliquée à ces peuples depuis Domitien. Nous devons à Probus l'existence des vins français mais aussi du fameux Tokay de Hongrie. Il prit soin de faire planter la vigne par ses propres soldats sur le mont Alma, près de sa ville natale de Sirmium, tenant  toujours ses troupes occupées même en temps de paix
          Cette habitude de confier à ses soldats des travaux d'intérêt public donne à son règne un éclat supplémentaire : l'assèchement de marécages, la construction de routes et la participation à divers travaux agricoles sont aussi des rôles dévolus à l'armée sous son règne.


          Mais Probus ne se repose pas longtemps sur ses lauriers. Au début de l'année 282 ap. J.C., il décide de reprendre le rêve d'Orient d'Aurélien et de marcher sur la Mésopotamie et l'Arménie qui sont un carrefour  stratégique pour les voies commerciales avec l'Inde , la Chine et la steppe eurasiatique...